Rencontre sur le Mékong

samedi 14 mars 2015

PHYSIQUE ET SPIRITUALITÉ  : réconciliation en cours !


Avertissement
Cet article prolonge la série déjà publiée sur ce blog : Mécanique quantique et textes de l'Inde. Pour une meilleure lisibilité, les termes techniques ont été évités ; de même, toute la partie purement scientifique, essentielle mais difficile d'accès. De ce fait, les concepts abordés risquent de paraître simplistes. Les lecteurs qui creuseront le sujet constateront qu'il n'en est rien et ce qui peut surgir ici comme supputation gratuite est sous-tendu par des recherches sérieuses extrêmement poussées.
Mes sources sont multiples mais ce sont les conférences et écrits de Philippe Guillemand auxquels je me réfère le plus. Philippe Guillemand est ingénieur de l'École Centrale de Paris, chercheur au CNRS, spécialiste  de l'intelligence artificielle (robotique). Dans diverses conférences données en 2013 et un ouvrage intitulé La Route du Temps, il réfléchit sur l'Espace-Temps et ose s'aventurer dans une région de la pensée (dimension spirituelle) que les physiciens classiques refusent et à laquelle d'autres, plus éclairés, souscrivent en évitant toutefois de se prononcer explicitement, de peur de passer pour des hurluberlus fourvoyés par la parapsychologie.
Les citations sont sans références précises car issues de notes personnelles prises alors sans intention de publication. On voudra bien excuser cette lacune, sachant que les lecteurs retrouveront facilement les sources sur le site internet de P. Guillemand (adresse note 12) ou dans ses conférences, accessibles sur Youtube.
Le lien avec le yoga (et autres domaines spirituels qualifiés volontiers d'"ésotériques", comme le chamanisme, le champ akashique[1], l'inconscient collectif…) est quasi évident. Le yoga nous met en effet au contact avec une réalité différente de celle limitée par les concepts habituels de l'espace, du temps, de la causalité, de la conscience, etc.
Ce qui est passionnant, c'est que des découvertes appartenant aux temps et lieux les plus reculés (en particulier l'Inde) sont en passe d'être avérées par les sciences les plus actuelles. Pour le dire succinctement, la physique rejoint la métaphysique. Il semble bien que nous sommes entrés dans l'ère d'une réconciliation entre science-physique et spiritualité. 


CHANGER NOS CROYANCES CONCERNANT LE TEMPS
Le temps est traditionnellement caractérisé par des concepts dont les plus fondamentaux sont : la causalité, le déterminisme, le hasard.

1/ La causalité : nous pensons que tout ce qui arrive dépend du passé. C'est une erreur de perspective. Le quotidien lui-même peut démontrer l'existence de la "rétrocausalité". Par exemple, l'intention d'aller chercher du pain est la véritable cause de mon déplacement en voiture et non l'inverse, comme on pourrait le croire (avoir pris la voiture serait alors la cause du pain acheté… ce qui est faux). C'est le futur (obtenir du pain) qui a créé le présent (prendre la voiture) !

2/ Le déterminisme : nous pensons que le monde est déterminé mécaniquement et de façon unique, que le futur est le résultat du passé. Dans ce cas il n'est pas de liberté possible. Il y a là une incontestable aberration.

3/ Tout ce qu'on ne comprend pas est attribué au hasard – qui devient une sorte de poubelle où est jeté pratiquement tout ce qui n'est pas réductible à des équations.

Ces délimitations enferment notre pensée, ne lui laissent aucune issue. Heureusement, depuis les années 2000, elles sont remises en question et une "nouvelle" vision s'impose peu à peu. En voici quelques aspects.

Temps et espace sont des illusions produites par la conscience. Ce constat n'est pas récent. Il n'empêche que nous demeurons prisonniers d'un mirage : nous pensons le temps comme s'il était absolu, extérieur à l'univers matériel et irréversible…
Or, pour les physiciens actuels, le temps linéaire n'existe pas, il n'est pas extérieur à l'univers matériel et il est relatif. La notion du "temps qui passe" ne correspond à rien, en physique. Einstein affirmait déjà : "Pour nous, physiciens dans l'âme, la séparation entre passé, présent et futur ne garde que la valeur d'une illusion, si tenace soit-elle." Et, trente ans plus tôt, Nietzsche : "Notre destin exerce son influence sur nous, même lorsque nos ne le connaissons pas encore : c'est notre avenir qui détermine notre présent".

La réalité est atemporelle ; présent, passé et futur sont simultanés. Il n'existe pas d'écarts temporels : le futur est déjà là mais nous n'en percevons que ce que nos cinq sens nous permettent de capter ; notre ego nous limite à l'espace-temps alors que notre *esprit" (ou "âme", "claire conscience", "intuition" etc.) est capable de voir au-delà si nous sommes suffisamment sensibilisés à un autre niveau de réalité[2]. Cette vérité, difficile à admettre, est néanmoins acquise et démontrée en physique (dont surtout la physique des particules) ; elle rejoint la pensée hindouiste et bouddhiste selon laquelle tout est contenu dans le présent.

Notre conscience est donc liée au présent mais la réalité est déjà créée dans le futur puisque le futur est déjà là.
Néanmoins, bien que déjà créée, cette réalité peut évoluer car le futur n'est pas totalement configuré.
Les déterministes pensent que tout est déjà en place, figé. Pourtant il semblerait bel et bien que les événements sont structurés par des informations qui viennent en-dehors de l'espace-temps. La création ne se ferait pas par hasard mais en fonction d'informations externes à cet espace-temps – ce qui nous permettrait d'intervenir sur notre destinée. Dans cette assertion audacieuse réside une véritable révolution, comme nous allons le voir.

CHANGER NOS CROYANCES CONCERNANT LE HASARD
On le sait maintenant, depuis l'avènement de la mécanique quantique : la réalité n'est pas indépendante de l'observateur. Il n'y a pas de hasard[3]. Les expériences d'Alain Aspect (médaille d'or au CNRS), en particulier la fameuse expérience EPR[4] des particules jumelles (au CERN) nous font découvrir la réalité de l'indétermination quantique[5]. Elles ont amené Antoine Suarez à déclarer que " Pour avoir une matière qui fonctionne de façon sensée, nous avons besoin d'une coordination qui n'est pas matérielle". Le "qui n'est pas matérielle" marque une différence fondamentale entre les nouvelles conceptions de la physique et les anciennes.

Partant de ce constat, P. Guillemand est amené à déclarer que la réalité dépend non seulement de nos observations (mécanique quantique) mais aussi de nos intentions. Et cela, c'est nouveau…

Il s'appuie sur les résultats de nombreuses expériences mettant de plus en plus en évidence que les phénomènes ne se produisent pas par hasard – chance et malchance n'ayant plus lieu d'être. Ce qu'on appelle les synchronicités[6] ou, plus familièrement, les coïncidences, ne serait pas les résultats d'une sorte de loterie.
Qui n'a jamais vécu des cascades de coïncidences, d'événements qui ont changé positivement ou négativement la vie – à tel point qu'invoquer un hasard heureux ou malheureux ne peut être raisonnablement soutenu ? Or, "L'un des aspects du caractère le plus intriguant des synchronicités est qu'il semble aujourd'hui de plus en plus admis qu'il soit possible de les provoquer, ce qui en ferait ainsi un phénomène reproductible qui ouvre la porte à une possible approche scientifique et expérimentale." (Philippe Guillemand).

CHANGER NOS CROYANCES CONCERNANT NOTRE IMPUISSANCE FACE AU DESTIN
Suite aux travaux de plusieurs physiciens éclairés (dont Jean-François Vézina[7], Johachim Soulières…), P. Guillemand aboutit à des conclusions saisissantes expliquant pourquoi nous rencontrons telle personne plutôt qu'une autre, pourquoi nous avons pris telle décision qui nous a fait franchir un cap au sein de notre évolution personnelle, comment nous avons pu mener à bien un projet en apparence peu réalisable…
D'après lui, ces synchronicités sont le résultat de nos propres attitudes, plus ou moins conscientes.
Nous pouvons créer notre réalité dans le futur parce que nous sommes reliés à la création par l'action intemporelle de notre esprit. Dit autrement : la synchronicité se produit "en conséquence d'un changement dans notre futur qui agit de façon rétrocausale sur notre présent – déterminisme inversé". Ou encore, de façon on ne peut plus ramassée : "Nos intentions créent des effets dans le futur qui deviennent les futures causes d'un effet dans le présent." (P.G.)

Cependant il serait naïf de croire qu'il suffit de désirer quelque chose pour que cela se produise. Il doit s'agir d'un besoin d'aide vraiment authentique et des conditions nécessaires sont à respecter :
-       Faire une demande intelligible, clairement formulée par le mental
-       S'impliquer en prenant des risques – c'est-à-dire en faisant fi des limites habituelles de la raison
-       Demander ce qui exercera une incidence sur notre chemin de vie (cela suppose qu'on soit prêt à affronter le nouveau)
-       Conserver son libre arbitre, son autonomie (il ne s'agit pas de demander à un "ange" de choisir pour nous)
-       Avoir atteint un niveau suffisant de "lâcher prise", de détachement (on sort donc du désir vulgaire de posséder)
-       Avoir confiance et être détendu par rapport à la demande (pas de crispation de la volonté)
-       Se positionner dans le don de soi (amour[8])


Comprenons bien ! Il ne s'agit pas de se souhaiter une nouvelle voiture parce qu'on "aime" bien les coupés sports, mais, après un examen profond, et si on a défini le sens qu'on donne à sa vie, il est possible de faire émerger une orientation nouvelle, de rendre effectifs des événements (même jugés hors de notre portée immédiate) grâce à une intention authentique donc non capricieuse ni dictée par le désir avide. En quelque sorte la magie est possible si… l'âme agit. Dans ce pouvoir (ce devoir) de clairvoyance, réside la plus grande difficulté : dans quelle mesure mon intention est-elle pure ?

P. Guillemand l'affirme avec force : si les conditions sont réunies, nous créons une modification de notre futur. L'intention deviendra agissante si nous conservons notre confiance et favorisons, par notre acceptation du changement (nous y sommes plus réfractaires que ce que nous imaginons), les possibilités d'émergence de l'événement appelé. Ce dernier peut apparaître n'importe où et n'importe quand. Nos limitations intérieures, nos peurs, nos croyances (à ne pas confondre avec la "foi"[9] , nécessaire, elle) doivent être annulées : nous devons nous en remettre "amoureusement" au chaos[10]. (relire la note 7. Cf. aussi Ishvara Pranidhana[11])

Le dernier obstacle est souvent celui de la raison, du mental, qui réprime l'intuition pourtant prête à nous laisser accéder au "cadeau" mis à portée mais dont nous ne percevons pas la présence.
Bien que possesseurs de la clef qui va ouvrir ou non la porte d'accès à ce qui nous est offert – la réponse à notre demande – nous pouvons fort bien demeurer aveugles à l'existence de ce "cadeau". C'est pourquoi, plutôt que d'en rester aux apparences, aux possibilités étriquées auxquelles nos croyances se limitent et par lesquelles nous sommes conditionnés (par exemple la vieille femme du dessin ci-dessous) nous devons changer notre point de vue habituel porté sur une réalité jugée à tort immuable, et nous ouvrir avec confiance à la nouveauté que l'univers (qui n'est pas univoque) nous propose (le jeune-fille du même dessin[12]).



CONCLUSION

Si notre destin est déjà réalisé sous forme d'une ligne temporelle, celle-ci n'est pas figée. Elle peut être modifiée et nous offre la possibilité d'un changement car ce que sera notre futur dépend des choix de notre conscience (et non de notre ego). La plus grande difficulté est de ne pas confondre notre libre-arbitre avec les désirs du mental[13]. Nous devons donc aspirer préalablement à un déconditionnement et, par une pratique adaptée (comme la méditation), tendre vers l'éveil spirituel (les pratiquants de yoga devraient voir exactement de quoi il s'agit).

N'oublions pas l'"amour" ! Il intervient comme inhérent à cette cinquième dimension ; il n'appartient pas à l'espace-temps des physiciens traditionnels mais peut être envisagé "scientifiquement" comme une composante essentielle de l'univers (qui n'a pas constaté que nous attirons ce que nous aimons et sommes attirés par ce que nous aimons ?) Donnée on ne peut plus incongrue mais tellement pertinente…

Philippe Guillemand résume fort bien la situation actuelle de cette physique d'avant-garde audacieusement enrichie d'un élément évidemment rejeté par les scientifiques traditionnalistes. Cet élément est l'esprit ("âme", "conscience en éveil", etc.) Vision scientifiquement subversive selon laquelle nous ne sommes pas agis par l'univers mais avons une possibilité quasi illimitée d'action sur lui – donc sur notre devenir : "L'évolution de la physique nous rapproche ainsi petit à petit d'une conception indéterministe du monde où l'être humain reprend toute sa place, en commençant par sa liberté. En cohérence totale avec l'ensemble des résultats de la physique moderne, et partant d'un seul postulat vraiment métaphysique, celui du libre arbitre de l'homme, la Théorie de la Double Causalité[14] édifie un véritable pont entre la science et l'âme (ou l'esprit), en faisant émerger l'Esprit de la matière ainsi que sa fonction sur l'univers [] Il existe un mécanisme régulateur du futur de l'univers qui est tout simplement notre conscience à travers laquelle va pouvoir s'exprimer notre libre arbitre."

Nous assistons sans nul doute à l'émergence de nouveaux paradigmes. La convergence entre science-physique et spiritualité n'est rien d'autre que réjouissante pour l'avenir de l'humanité – si elle réussit à en dégager les stupéfiantes implications.

Gérard Duc





[1] Du terme sanskrit désignant l'"éther", à la source de toute création, conservant et pouvant restituer l'information. Le grand spécialiste est Erwin Laszlo. Voir son ouvrage : Science et Champ Akashique.
[2] … et conscients de maya !
[3] "Il suffit de remplacer le concept d’un tirage au sort fait par la nature par celui d’une information qui entre dans notre univers physique et dont il est inutile de rechercher les causes à l’intérieur de cet univers: il faut les rechercher ailleurs." (P.G.)
[4] EPR = Einstein, Podolsky, Rosen – expérience menée par ces trois savants.
[5] Ce principe énoncé en 1927 affirme que pour une particule donnée, on ne peut connaître simultanément sa position et sa vitesse alors que la mécanique classique de Newton affirme que la dynamique de la particule est entièrement déterminée si l'on connaît à chaque instant sa position et sa quantité de mouvement.
[6] Carl Gustav Jung est à l'origine, en 1946, de ce concept de synchronicité. Il s'agit de "l'occurrence simultanée d'au moins deux événements qui ne présentent pas de lien de causalité, mais dont l'association prend un sens pour la personne qui les perçoit." (Wikipédia)
[7]  Voir son ouvrage : Les Hasards nécessaire.
[8] "L'amour dont il est question ici n'est pas l'amour au sens où on l'entend habituellement ni au sens "new-age". Il n'est pas un produit de l'activité cérébrale, contrairement au désir. Il est une essence fondamentale de l'espace intérieur, au même titre que la lumière dans l'espace extérieur. Il s'agit de l'essence du (moteur du) libre arbitre. Si le libre arbitre définit un archétype vers lequel on tend, il faut encore définir la puissance (ou l'intensité) avec laquelle on tend vers la réalisation de cet archétype. C'est ce que j'appelle l'amour, faute de trouver une meilleure appellation, car on tend vers ce que l'on aime, tout simplement. L'amour et le libre arbitre sont indissolublement liés, tout comme une forme (un contenant) est indissolublement liée à son contenu. Cela n'a rien à voir avec l'amour au sens du désir par exemple, car le désir a plutôt l'effet contraire." (P. G.)
[9] Cf. shraddha
[10] "La théorie du chaos est une théorie mathématique et physique dédiée à l'étude des systèmes dynamiques. Elle s'applique à toutes sortes de sciences : astrophysique, météorologie, sciences humaines, biochimie moléculaire1. À titre d'exemple,voici une application originale : Le réseau Bee-Secured spécialisé dans la surveillance des environnements et des écosystèmes utilise la théorie du chaos dans ses modèles mathématiques de calcul d'interactions du comportement des abeilles et de son environnement." (Wikipedia)
[11] Action de s'en remettre au brahman, au Divin… (cf. "surrender", le bhakti-yoga…)
[12] Ce n'est évidemment qu'une approximation grossière de ces réalités simultanées dont la saisie dépend de perceptions plus complexes que celle de la vue.
[13] On aura reconnu avidya, bien sûr ! A chacun(e) de découvrir en quoi de nombreux aspects de cet articles recoupent le domaine du yoga…
[14] Voir le site de P. Guillemand, très riche : http://www.doublecause.net

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