Rencontre sur le Mékong

vendredi 14 janvier 2022

LA MEDITATION C'EST PAS MON TRUC...

(cet article s'adresse à des débutants)

 

C'est parce que j'ai entendu x fois cette remarque, souvent formulée sous des formes détournée  ("Méditer, oui, mais je n'arrive pas à trouver le temps" ou "J'ai essayé mais je ne trouve pas  (je ne trouve plus) la motivation suffisante pour m'y tenir") que j'ai envie de partager ces quelques réflexions nées des difficultés que, comme beaucoup, j'ai aussi traversées. Il s'agit  de considérations simples et pratiques et non de considérations d'ordre métaphysique.  

 

Le manque de temps ?


Si l'on est honnête, l'argument ne tient pas.  

Les 5 minutes suffisantes pour commencer régulièrement cette pratique, on les trouve facilement lorsqu'il s'agit de faire quelque chose de nécessaire (par exemple se brosser les dents) ou d'agréable (manger un gâteau...)

 

La motivation ? 

Sur un plan général, cet argument est valable : si je ne vois pas d'intérêt à tricoter ou à jardiner, il va de soi que je n'ai aucune envie de commencer…

Cependant, pour peu qu'on y réfléchisse un instant, la situation est différente, en tout cas si je suis au courant des bienfaits décrits par tous ceux qui pratiquent une forme de méditation (il en existe beaucoup) : ils sont incontestablement efficaces pour la santé – physique et psychique. On en parle suffisamment pour n'en plus douter. Que la méditation soit actuellement de plus en plus pratiquée avec succès dans les hôpitaux (cf. Christophe André à Ste Anne) n'est pas non plus anodin.

 

Pour nous limiter à des constats vérifiables par des IRM ou autres moyens scientifiques :

-       elle diminue l'anxiété, le stress, évite les rechutes de dépression ; 

-       elle améliore le sommeil, l'attention, la mémoire et limite les effets de l'âge sur le cerveau ; 

-       elle permet un bien meilleur contrôle des émotions, réduit l'hyperactivité, l'impulsivité et particulièrement la colère; 

-       elle améliore la réponse cérébrale à la douleur ;

-       abaissant la pression sanguine, elle réduit les risques d'accidents cardiovasculaires ; 

-       elle est remarquablement efficace pour développer les défenses immunitaires (anticorps)

 

Ces bienfaits constatés depuis l'Antiquité, sont tous validés actuellement par des études scientifiques menées par des chercheurs en neurosciences. 

 

Sachant cela, comment peut-on ne pas être motivé par cette pratique (gratuite  ) et dont les incidences sur notre bonne santé physique et mentale sont universellement attestées ? Nous sommes tous soucieux de notre bien-être. Alors, pourquoi ne réussissons-nous pas à "nous y mettre" ou à persévérer ? Parce qu'il existe des obstacles réels.

 

Les obstacles :


1/ Les effets ne sont pas immédiats 

Nécessaire à la survie propre à la plupart des vertébrés, situé dans le cerveau (pour les exigeants : le long du faisceau médian du télencéphale),  le "système de récompense" vise à obtenir un plaisir aussi immédiat que possible. C'est le cas pour ce qui concerne la nourriture, la reproduction, l'adaptation à l'environnement – en lien direct avec le bien-être émotionnel.

Or méditer ne procure pas de manière instantanée ce plaisir, comme l'action de manger un baba au rhum (si j'aime ça, évidemment).

Et pourtant, des études ont montré que le bien-être procuré par la méditation, s'il n'est pas forcément perceptible dans l'instant, le devient rapidement. "Des améliorations émotionnelles, cognitives et sociales sont possibles à l'issue de 5 séances de 20 minutes" (Futura-sciences). Mais oubliez cela ! D'abord parce que 20 minutes c'est long… C'est là d'ailleurs qu'apparaît le deuxième obstacle.

 

2/ S'asseoir sans rien faire pendant un long moment devient vite insupportable

Cela est inévitable. Nous sommes toujours dans le "faire", même lorsque nous disons "Je n'ai rien fait de toute la journée". Écouter un débat ou un disque, contempler un paysage ou un tableau, bayer aux corneilles, manger, rêvasser, sont des activités – qui, de plus, m'apportent "quelque chose" de plaisant…

Mais rester assis à observer Dieu sait quoi, (nous y reviendrons), franchement… je ne ressens rien d'agréable, ça m'énerve plutôt et ça me paraît interminable !

Ce constat est absolument "normal". Nous ne sommes pas programmés pour cette "inactivité". Il est naturel qu'une forme de rejet apparaisse si on se l'impose trop longtemps. En plus, cerise sur le… baba, on a tendance à culpabiliser ("Je ne suis même pas capable de…", "J'aurais mieux fait de…") C'est pourquoi, en ce qui concerne la durée, pour commencer (ou recommencer) il est vraiment nécessaire de ne pas chercher à dépasser quelques minutes – ce qui n'est déjà pas si facile.... Si l'on respecte ce tempo, quelques minutes finiront par paraître brèves et seront beaucoup plus efficaces que 20 ou 30 ou a fortiori 60 minutes (la qualité de l'expérience, si cette dernière n'est pas spontanée et agréable, est inversement proportionnelle à la quantité du temps qu'on lui consacre)… Il arrive cependant que le moment le plus intensément apaisé de la méditation survienne après 5 minutes… Il revient à chacun d'expérimenter ce qui convient le mieux. Nous fonctionnons tous différemment.

 

3/ Que faire pendant ce temps d'assise ? Quelle technique adopter ?

Des techniques il en existe de multiples. Vous le savez si vous en avez eu vent, certaines sont complexes et elles peuvent décourager avant qu'on les ait expérimentées ! C'est logique car elles s'adressent à des "spécialistes" (souvent indiens) et elles visent des objectifs de nature spirituelle, transcendantale, ce qui revient un peu à vouloir apprendre à marcher sur l'eau avant de savoir ramer… 

Celle qui vous est proposée ici est unanimement reconnue comme la plus efficace par ceux qui l'ont adoptée (si vous souhaitez des références je vous les transmettrai).

 

La première chose à intégrer est qu'il n'y a aucun effort à fournir. Rien de contraignant. Il s'agit d'abord de s'asseoir confortablement (même sur une chaise), de ne pas être gêné corporellement. Ensuite il suffit de fermer les yeux (ce n'est pas obligatoire mais plus facile) et d'observer ce qui se passe. C'est tout ! Observer ce qui se passe, c'est prendre conscience de la respiration (inspir, expir avec les petites pauses entre chaque) et des pensées dont l'enchaînement, inévitablement, vient s'immiscer et interrompre le cours de cette observation. Il convient alors de prendre les pensées sur le fait, de les accepter sans râler, de simplement en être conscient ("Tiens ! je viens de penser au coup de téléphone que je dois donner et ensuite à tante Berthe qui est malade, puis à la vaccination anti-Covid – j'y vais ou j'y vais pas ? etc.") On constate alors sans ajouter de jugement, sans faire de commentaire (du type "C'est nul, c'est casse-pieds, je n'arrive pas à rester concentré, etc.") puis de revenir aussitôt à l'observation de la respiration. ET C'EST TOUT !

Surtout, ne rien attendre de particulier. En quittant la posture je n'aurai rien à raconter d'extraordinaire. Peut-être me sentirai-je sur un petit nuage ou un peu ailleurs… ou content que ce soit fini, ou rien du tout,  peu importe. L'essentiel a eu lieu. Je n'en ai pas eu conscience mais mon cerveau, oui !

Si durant ces 5 minutes on perçoit des images, des visages, des points lumineux ? Cela peut arriver. Dans ce cas on procède comme pour les pensées : on constate le phénomène, sans plus, et on revient à l'observation du mouvement respiratoire.

Quant à la respiration elle sera tranquille, plutôt lente, régulière, apaisante. On surveillera les épaules (elles seront relâchées) et le dos, si possible pas affaissé.

 

Concernant les effets obtenus

La première règle, on vient de le dire, est de ne rien attendre ! Toute attente crée une crispation. Si je m'assieds alors que la volonté de me détendre m'habite durant l'exercice, cela crée une tension – l'opposé de ce qui est souhaité ! 

Il est légitime d'espérer les bienfaits déjà mentionnés. Nous les obtenons un jour ou l'autre. Mais oublions de les attendre ! Quand nous ingérons un comprimé contre une douleur quelconque, nous ne restons pas plantés devant notre montre : la douleur cesse ou s'atténue, c'est à ce moment que surgit le constat de l'efficacité du remède. 

 

Au bout de quelque temps de cette pratique assidue, si vous n'attendez rien, n'espérez rien (c'est sans doute le plus difficile au début – mais seulement au début), vous serez surpris d'avoir dépassé les 5 minutes parce que, finalement, vous venez de vivre un moment agréable – sans plus, peut-être, mais "quelque chose" commence à vous plaire. Ne vous forcez pas alors à vous fixer des objectifs de temps : si un quart d'heure s'écoule, il doit s'être passé spontanément. Mieux valent 5 minutes agréables qu'un quart d'heure d'efforts. Oubliez compétition et records…

 

Une objection surgit parfois : "Méditer, n'est-ce pas une façon un peu lâche de me mettre à l'abri du monde?" Affirmons sans hésiter que méditer c'est au contraire s'intégrer au monde, c'est "entrer dans la danse de la réalité".

Autre objection : "Méditer n'est-ce pas prétendre à vouloir jouer les sages ?" En aucun cas. C'est simplement m'ouvrir à qui je suis, avec mes imperfections. C'est me mettre un peu en retrait, devenir plus conscient et être moins perturbé par des émotions qui, dans le quotidien, me malmènent. Je ne serai peut-être pas toujours calme mais de plus en plus pacifié…

 

Mais tout cela et tout ce qui n'est pas abordé ici, on le constate progressivement, on le vit avec la pratique. Rien donc ne sert de développer : chacun l'expérimentera avec le temps. Comme dit le sage : "Tu me demandes quel goût a le citron. Je peux t'en parler pendant des heures. Mais tu ne sauras jamais réellement quel est le goût du citron si tu ne le goûtes pas toi-même !"

 

A vous de voir… ou non !

 

                                                                                                                                GD

 


 




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