Rencontre sur le Mékong

jeudi 24 janvier 2013

BILLETS DOUX / DURS (6) La mort, épouvantail absolu.

La peur de la mort 



Cette peur ne se nourrit que de chimères. Nous sommes des chenilles qui ignorent que mourir c'est devenir papillon. La chenille craint-elle la métamorphose qui s'apprête ? Nous, oui.





Est-ce que c'est vraiment parce que nous avons peur de la mort que nous ne la regardons pas en face ? Ou bien parce que nous ne la regardons pas en face qu'elle nous effraie ? Ce que je ne regarde pas vraiment me reste inconnu. Et l'inconnu effraie. Certes, direz-vous, mais nous avons beau mettre le nez dessus, la mort nous restera à jamais inconnue... et nous continuerons d'avoir peur d'elle.
Cette logique est spécieuse.

Les civilisations du passé vivaient avec la réalité et non à côté... (nul ne contestera que la mort est une réalité...) Actuellement, en Occident, tout semble étudié pour masquer, occulter, déguiser la seule chose dont nous soyons certains : nous mourrons un jour. Combien de temps a-t-il fallu pour que la "terrible maladie dont a été victime Machichose" devienne : "Machinchose est mort du cancer - ou du sida" ? 

Dès lors on peut se demander si, à force d'être soumis à ces euphémismes qui dénaturent... la nature (la mort est "naturelle"), nous ne sommes pas toujours davantage victimes du raisonnement suivant : si on n'ose même pas la nommer, c'est que la mort est vraiment nuisible et à juste titre terrifiante. Et peu à peu, s'installe en nous la certitude que la mort est l'ennemie. Bel exemple du pouvoir quasi absolu qu'exerce sur notre mental une absurdité présentée comme vérité incontestable ! Nous admettons comme "évident" ce qui, en fait ne l'est pas du tout et considérons comme hideux et ignoble ce qui, pourquoi pas, serait "le moment culminant de notre vie, son couronnement, ce qui lui confère sens et valeur." (Marie de Hennezel, La Mort intime, R. Laffont, 1995).

Fermer les yeux sur ce qui est, non seulement ne supprime pas ce qui est, mais crée le pire. L'ombre est plus effrayante que la source de l'ombre. Et si je refuse d'observer bien en face, mon imagination prend le pouvoir, se substitue à la réalité et n'en finit pas de projeter ses monstres intimes.

Il est possible de vivre "avec" la mort et non "contre" elle. Et de cette cohabitation peut surgir non seulement la paix de l'esprit mais une "joie essentielle" qui ne laisse plus aucune place à la peur.

Se pencher sur les Livres fondateurs, étudier la Gîta, les Yoga-Sutra est important mais inutile si on n'essaie même pas de vivre le message qu'ils transmettent.

Nous sommes des chenilles qui ignorent que mourir c'est devenir papillon. La chenille craint-elle la métamorphose qui s'apprête ? Nous, oui. Nous tenons à notre médiocrité et nous cramponnons à ce que nous croyons posséder légitimement. Non seulement nous ne possédons rien (et surtout pas notre vie :  le premier souffle nous a été donné, et nous devons le rendre en expirant) mais nous refusons de lâcher l'ombre alors que nous sommes destinés à la Lumière (quelle qu'en soit la nature). 

Ajoutons pour terminer (ce qui pourrait faire l'objet d'un ouvrage - mais ce n'est qu'un un "billet" !), que si c'est en déshabillant un épouvantail que je n'en ai plus peur, c'est aussi et surtout en méditant sur la nature de ma peur que je peux la faire disparaître. Car rien de légitime n'en justifie la présence. 

                                                                                                                                                     GD












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