La Bhagavad-Gîtâ : le contenu
Pour aller plus loin et découvrir comment cet enseignement peut transformer radicalement le sens que nous donnons à la vie (si tant est que nous lui en donnons un), consulter les chapitres du sommaire intitulés : "YOGA : REPONSES A DES QUESTIONS FONDAMENTALES"
Bhagavad-Gîtâ signifie en sanskrit "le chant (Gîtâ) du Bienheureux
Seigneur (Bhagavad)"
c'est-à-dire Krishna.
Elle fait en principe partie de la smriti mais les Krishnaïtes lui accordent la même autorité qu'au Veda.
Elle se présente comme une révélation de Krishna (en tant qu'avatar de
Vishnou) à Arjuna.
Les plus grands sages l'ont commentée :
Shankara fondateur
du Vedanta a composé un Gîtâbhâsya.
Râmânuja (11ème s.) et Madhva 14ème s. ont
laissé eux aussi un important commentaire du texte sacré.
Râmakrishna
(1834-1886) fonda en grande partie sa spiritualité sur la Gîtâ, et la mission Râmakrishna, (fondée
en 1866) continue d'oeuvrer dans le monde
Shrî Aurobindo
(1842-1950), alors qu'il était en prison (du fait de ses activités
nationalistes) en 1919, eut la vision de son union avec le Krishna de la Gîtâ. C'est alors qu'il se retira à
l'ashram de Pondichéry. Lui aussi écrivit un commentaire de la Gîtâ (édité chez Albin Michel).
Résumé de la Bhagavad-Gîtâ
Le
roi aveugle Kuru, qui règne en ce temps sur ces contrées, devenant vieux
décide
de donner son trône non à son propre fils mais au fils aîné de son frère, le jugeant
plus apte à régner selon les principes de droit et de la justice. Blessé par
cette décision, son fils, par ruse et trahison, a quand même pu s'emparer du
trône paternel et décide d'anéantir son rival de cousin par tous les moyens.
Un
roi chevalier Shri Krishna (qui se révélera d'incarnation divine) ami des deux
camps, essaye de dissuader les Kaurava de mettre à exécution leurs mauvais
desseins mais, la guerre devenant inévitable, il offre alors son aide aux deux
camps. A l'un, il proposera le don de sa propre armée et à l'autre sa personne
mais sans combattre. Il ne conduira que le char de combat de celui qui le
choisira.
Arjuna,
valeureux chevalier, dirigeant l'armée des Pandava, choisit sans hésiter la personne
de Shri Krishna. Le camp adverse se voit rassuré de la naïveté d'Arjuna et
reste persuadé de sa suprématie surtout avec l'appui de l'armée de Krishna.
Ainsi,
Krishna, le Divin incarné, devient l'aurige du valeureux guerrier Arjuna et conduit
son char entre les deux armées, prêtes à s'élancer l'une contre l'autre pour un
combat sans merci.
Dans ces moments ultimes qui précèdent l'affrontement,
Arjuna voyant ses proches, ses compagnons d'arme, ses instructeurs, ses parents
dans le camp adverse, liés par leur serment d'allégeance, est submergé par une
vague d'émotion à l'idée qu'il devra les combattre et les tuer. A ce moment crucial
où il doit diriger l'armée et les hommes qui sont sous ses ordres pour leur
victoire, il est saisi de doute.
S'instaure
alors un dialogue entre le chevalier et son aurige et, à travers cet échange de
paroles, toute une série de thèmes d'ordre moral et philosophique sont abordés
et forment l'enseignement prodigué par le maître à son disciple sur l'ensemble
de ce sujet
La non-violence
La Bhagavad-Gîtâ se déroule dans
une atmosphère guerrière. Elle s'ouvre au chant I par le tableau des deux
armées face à face, en ordre de bataille. On pourrait s'en étonner, parce que
l'Inde est traditionnellement associée à l'idée de non-violence.
En fait, la relation de l'hindouisme à la violence est plus complexe.
La non-violence (ou plus exactement la non-nuisance, ahimsâ) est plus
précisément le devoir des brahmanes, et d'eux seuls. Certes, cet idéal s'est
étendu à l'ensemble de l'Inde. Mais la deuxième caste, au contraire, avait un
devoir de violence, c'est celle des kshatriya qui détenaient le pouvoir
politique.
Si l'Inde a connu très peu de conflits religieux à l'intérieur de
l'hindouisme, c'est précisément à cause de cette stricte séparation des rôles :
la politique aux kshatriya, et
le rite aux brahmanes. Les brahmanes n'ont jamais détenu à aucune époque le pouvoir
politique, ni ne l'ont recherché. Le seul pouvoir dont ils ont joui, c'est le
pouvoir religieux.
Structure narrative [1]
Rappel de la situation : Le royaume de KURU est l’enjeu de
la lutte qui oppose les KAURAVA et les PANDAVA qui ont dû s’exiler pour 12 ans.
Les KAURAVA refusent de restituer aux PANDAVA leur royaume.
Ch. I
KURUKSHETRA
|
Le
champ de bataille (Kuru) c’est aussi le champ du dharma (conflit entre l’obligation d’accomplir son
"devoir" et rien d’autre…
Arjuna,
après une dernière tentative de conciliation, en bon kshatriya, accepte le combat. Alors que Duryodhana a demandé à
Krishna son armée, Arjuna l’a demandé lui, et "rien d’autre".
Arjuna savait abstraitement à qui il serait confronté ; mais là, il
réalise vraiment. Perdant ses moyens, il est submergé par un tragique
dilemme : renoncer ou se battre. C’est le sujet de ce chapitre.
Sa
compassion est telle, qu’abattu, il en arrive à souhaiter la "non
victoire", préfère mourir.
Cette
chute va faire jouer à Krishna le rôle de "guru".
|
Ch. II
UTTIHTA !
(DEBOUT !)
La discipline du yoga
Seule l’âme est immortelle
Les devoirs du guerrier
Cf. aussi XI,32-34 et XVIII,43,59…
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Arjuna
ne sait plus ce qu’il doit faire pour accomplir son devoir (svadharma).
K.
vise à le faire réagir, mais ne raisonne pas encore (bon
pédagogue !) : il encourage. D’ailleurs, A. ne lui a rien demandé
(il faut que l’élève soit prêt !). Et puis, il faut aussi que l’émotion
s’apaise.
La
stratégie de K. agit. La demande essentielle est formulée. K. va pouvoir
parler et aider A. à y voir plus clair. Pour cela, il aborde le problème de
biais et non de front (technique du yoga !). Il expose la doctrine du Sâmkhya : seule l’âme est
immortelle. Tout a une fin mais pas le Ddivin. Donc A. doit se battre sans se
lamenter. Les répétitions montrent la technique – et la patience – du Maître…
Le
devoir du guerrier est de combattre. S’il meurt il sauve son âme. Il est
essentiel que chacun accomplisse son devoir.
Mieux
vaut un peu de dharma que pas de dharma du tout ! A. est abattu mais
écoute. K. poursuit avec d’autres arguments :
· maîtrise des guna,
des dualités
· renoncement aux fruits de l’action mais pas à
l’action
· équanimité dans la réussite ou l’échec
· conscience dans l’acte
· accession au samâdhi.
Stabilité de l’Intelligence
La
curiosité d’A. est éveillée
La
maîtrise des sens mène à la perfection. Elle évite attachement, colère…
La
stabilité, la paix, sont données à qui renonce aux désirs qui empêchent
l’Intelligence.
|
Ch. III
KARMA-YOGA
Comment agir ?
Cf. IV, 34
|
Arjuna
est encore dans la confusion : si la vision claire de l’action est
supérieure à l’action, pourquoi agir ?
K.
lui explique que les 2 voies sont connaissance et action.
Ne
pas agir est impossible (guna)
Croire
qu’on peut l’éviter est une erreur : l’inaction est forme d’action.
Pratiquer
les œuvres en se libérant de tout attachement est le vrai
"sacrifice". Cela fait venir le divin sur la terre.
K.
lui-même, qui a tout, agit, mais pour les autres. Il convient donc
d’accomplir son svadharma avec ses
propres moyens, si humbles soient-ils. Vivre pour accomplir le devoir d’un
autre est pire que mourir.
A.
semble vraiment captivé. Les questions se font plus précises. Il est
plusieurs façons d’agir :
· avec l’aveuglement de la passion, comme Duryodhana
· par confusion ou apathie, comme Arjuna
· avec la claire vision, comme Krishna
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Ch. IV
LE SENS DU SACRIFICE
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Donc
liberté dans l’action (que donne le discernement) avec détachement des
fruits. Le résultat ne nous appartient pas.
K.
définit sa nature divine. Celui, qui, comme lui, abandonnera les fruits des
œuvres, ne sera plus enchaîné.
Offrande
des œuvres à Brahman (mêmes
matérielles ou celle du prâna, ou
de jnânâ). Le yoga est abandon.
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Ch. V
LE RENONCEMENT
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Arjuna
demande quelle est la meilleure voie : yoga ou Sâmkhya ?
Supériorité
du yoga des œuvres. Y. et S. visent le même but.
« Je »
n’agit pas : seuls mes sens agissent (=pas d’attachement)
L’abandon
des fruits garantit la paix.
Connaître
Brahman est possible si on se
détache du plaisir ou du déplaisir liés au monde extérieur.
Ekagrata, prânâyama, maîtrise des sens = paix.
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Ch. VI
RECUEILLEMENT ET MAITRISE DE SOI
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Développe
la fin du ch. V
Le
moi supérieur aide à conquérir le moi inférieur.
Calme,
maîtrise des sens, équanimité, pratique… permettent le yoga.
Nécessité
de la modération, de la constance, de la concentration, du calme mental.
Arjuna
est épouvanté par la difficulté (calmer le mental). Il suffit de fournir les
efforts appropriés : pratique constante, non-attachement.
K.
rassure A. : tout est donné à qui "s’abandonne à Moi".
Donc :
évolution logique du yoga des œuvres au yoga de la dévotion.
|
Ch. VII
CONNAISSANCE INTUITIVE
Les deux natures
Synthèse dévotion-connaissance
|
K.
explique à A. comment atteindre la Connaissance suprême de la vraie nature du
Divin (Purushottama, l’Etre
suprême)
Rien
n’existe hors de Lui.
Tout
est divin
Parmi
les bhakta, les meilleurs sont ceux
qui se consacrent tout entier au Divin.
On
peut L’adorer à travers une forme, mais Il est sans forme.
Ceux
qui connaissent le Divin sont libérés.
|
Ch. VIII
LE DIVIN SUPREME
OM l’impérissable
|
Arjuna
pose des questions très précises concernant le Divin, la mort…
Celle-ci
permet la libération de l’âme (OM)
La
libération suprême (sans renaissance)
Le
non-manifesté
|
Ch. IX
RAJA-YOGA
|
Tournant
décisif : K. va ouvrir l’esprit d’A. à la Connaissance de la Divinité
intégrale et le mener à la conscience de sa Mission.
A.
doit savoir qu’il est instrument de l’Action divine.
Le
Divin est partout et n’est enchaîné par rien.
Ceux
qui sont dans l’erreur ne le voient pas dans leur prochain, mais ceux qui
pratiquent l’oblation intérieure le voient en tou et tous.
Ceux-là
ne peuvent périr.
|
Ch. X
LA PAROLE SUPREME DE LA GITA
Les manifestations divines
|
« Celui
qui me connaît connaît le non-né »
Toutes
les existences sont des devenir du Divin.
A.
répète comme
pour s’en pénétrer les différentes natures du Brahman.
Il
demande à K. de lui parler de son yoga. K. s’exécute et énumère : il est
le Veda, océan, arbres….
commencement, fin et milieu.
Il
est ici et partout.
|
Ch. XI
LE DIEU SE MONTRE
|
Arjuna
n’est pas encore sorti du mental. il désire voir le "corps divin"
de K.
K.
se montre à lui dans sa splendeur divine. A., stupéfié, encore davantage
quand K. lui révèle être le Dieu lui-même.
Arjuna
n’est donc qu’instrument et doit en venir au combat.
Il
salue son Dieu.
|
Ch. XII
QUEL YOGA ?
|
Arjuna
ne sait quelle voie est la meilleure : jnâna, bhakti ?
Les
diverses voies sont résumées. Le bhakti s’avère être le plus important.
|
Ch. XIII à XVII
Guna
Le figuier cosmique
Etres divins et démons
Influence des guna
|
K.
reprend des détails de ce qui a déjà été dit.
Il
définit les 3 guna au-dessus
desquels l’âme doit s’élever pour se libérer. Cela est possible par la
dévotion complète au Divin.
Les
ignorants s’arrêtent aux apparences. Les autres voient le Seigneur.
Purusha et Purushottama.
Nature
dévique et nature asurique
Les
3 tempéraments. La triple ascèse.
|
Ch. XVIII
|
Le
renoncement tracasse encore A.
K.
dit à A. qu’il lui a donné le plus haut secret : qu’il agisse maintenant
en toute liberté. A. a mûri : il peut maintenant agir seul.
Mais
qu’il ne doute pas de Sa protection : Il est prêt à se charger de tout.
Magnifique
réponse, définitive : « Je puis enfin dire : que ta volonté
soit faite » (= j’agirai selon ta parole)
|
K.
a amené A. a tout comprendre par soi-même. La confiance dans le Maître doit
être absolue (ce n’est pas facile car l’ego pousse l’intellect à vouloir tout
vérifier).
[1] Ce tableau a été fait à partir de
l'édition de la Bhagavad-Gîtâ commentée par Shrî Aurobindo (A. Michel)
G D
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