L'Isha Upanishad (traduction de référence revue par J. Herbert et contenue dans Trois Upanishad de Shrî Aurobindo, Albin Michel)
Attentions aux séduisants reflets lumineux qui ne sont pas la source de la lumière... Mais le Divin est partout.
Les idées contenues dans cette Upanishad :
Versets 1 à 3 :
L'Être est présent dans tout ce qui constitue l'univers.
Tout désir de jouissance est signe que le Divin nous habite. Ce désir doit
nous
mener à comprendre que le Divin est en tout et nous inciter à ne plus
désirer
que Lui, donc à renoncer aux objets du désir et enfin au désir
lui-même.
Il devient alors possible d'agir
sans être prisonnier de l'action.
Sans cette attitude née de la
Compréhension de l'Essentiel en nous, nous
restons plongés dans les ténèbres de
l'ignorance.
Versets 4 et 5 :
"Cela" (= le brahman,
le Soi) constitue l'Essence de tout ce qui est, même dans
ce qui nous apparaît contradictoire ou inconciliable (le dedans et le dehors, par
exemple)
Versets 6 et 7 :
L'homme libéré a résolu ces
incompatibilités apparentes. Il a conscience de la
suprême Unité.
Verset 8 :
Le Soi gouverne tout ce qui est.
Versets 9 à 14 :
Lorsqu'ils sont dépassés,
l'ignorance et la connaissance, le devenir et la
dissolution, permettent à
l'être éclairé d'accéder à la Connaissance suprême -
donc à l'Immortalité.
Versets 15 et 16 :
Les reflets les plus lumineux
qui séduisent ne sont que des reflets
masquant le
Divin qui en est la source.
Versets 17 et 18 :
L'Energie - dynamisme divin - peut nous permettre
d'atteindre la Vérité si nous
nous soumettons à Elle.
Le message :
Le monde et le Divin offrent une
unité d'essence parce que le Divin imprègne tout. Nous pouvons donc vivre
activement en ce monde tout en vivant dans et pour le Divin.
Ses implications pour nous :
Evitons déjà cette erreur : séparer
le monde et le Divin. Le Divin ne se réduit pas au monde mais il
l'"habite" car le monde procède de Lui (un peu comme le peintre
"habite" le tableau qu'il a peint). Pourquoi, dès lors, penser que se
soustraire au monde est la condition nécessaire pour trouver le Divin ? Notre
vie, ici-bas, maintenant, là où nous sommes, est "en Lui" ("en
Dieu" dirait un chrétien : "le royaume des Cieux est au-dedans de
vous", dit le Christ).
L'apparence des choses (la beauté
que recherchent les arts, la vérité que recherche la science) est déjà une manifestation du
Divin que nous recherchons sans en avoir forcément conscience.
Tout comportement humain, même le
plus apparemment aberrant est manifestation de cette quête : le drogué, le
viveur, le séducteur impénitent manifestent, par leur comportement même, ce
désir d'atteindre l'absolue Félicité. Mais s'ils en restent à ces moyens, ils
stagnent dans l'erreur, l'ignorance (avidya). Pour éviter l'impasse il convient
d'aller au-delà de cette expression grossière de la soif d'absolu qui se limite
à la volonté de possession.
"Détache-toi et jouis", dit le 1er verset de
l'Upanishad. La contradiction n'est qu'apparente : en fait, elle nous suggère
d'aimer ce que nous offre le monde (même ce qu'il offre de plus matériel) donc de
nous "émerveiller" - ce qui suppose une conscience profonde que ce
qui nous fait jouir est plus que ce qui nous fait jouir. Prenons l'exemple de
cette attitude consistant à acheter un objet qui nous plaît : est-ce la valeur
marchande de l'objet, qui fait notre plaisir ? Si nous prenons conscience de
cela, si nous réalisons que la joie est en nous et non dans l'objet, viendra
peut-être alors le jour où nous n'aurons plus besoin de posséder l'objet. C'est
ce que nous expérimentons lorsque nous admirons un tableau de maître : il nous
réjouit profondément sans que nous ayons besoin de le posséder. Si nous
généralisons ce type de renoncement nous sommes alors mis face à face avec le
seul "émerveillement" qui n'est plus volonté de possession.
A un degré encore supérieur, nous
pouvons être amenés à voir le Divin en tout : dedans et dehors, comme dit
l'Upanishad. Etant sans cesse et partout relié à Lui aucun besoin de possession
ne vient alors nous séparer de la Source à laquelle nous pouvons nous abreuver
directement, sans passer par un intermédiaire (chose ou être) qui fait
forcément écran. On comprend alors que voyant "le Soi dans tous les êtres
et tous les êtres dans le Soi", la haine, la souffrance et la peur
deviennent impossibles à celui qui a réalisé.
Seulement l'intériorité est
souvent recherchée à l'extérieur : le drogué la recherche dans la drogue,
l'artiste dans son œuvre, le politique dans le pouvoir, l'homme d'affaire dans
l'argent, l'intellectuel dans les livres, etc. Si l'individu prend conscience que
l'intériorité et la félicité qui l'accompagne ne sont pas en dehors de
lui-même, apparaît alors une autre démarche. Celle-ci commence par le
renoncement à cette recherche effrénée d'un bien extérieur - qu'il soit concret
ou abstrait. Non pas renoncement volontaire, crispé, mais lâcher-prise s'imposant de lui-même. Le but poursuivi apparaît
alors dans sa simplicité car il n'est pas matériel : il est d'ordre spirituel ;
il n'est plus à rechercher "à l'extérieur" ; il n'est même pas à
rechercher : il est déjà en moi. Reste alors à "réaliser" cela.
Voilà pourquoi l'attachement aux biens de ce monde peut-être le début de la sagesse. Voilà aussi pourquoi les plus avides, ceux qui tendent toute leur énergie dans cette quête mal orientée peuvent devenir les plus grands mystiques. L'erreur serait de croire que lâcher prise s'obtient en ne "faisant rien", en attendant que cela se fasse tout seul… Paradoxalement, ne "rien faire" (= la paresse !) est encore un "faire" mal orienté. En revanche "laisser faire", est un "faire" qui peut mener au non-faire. C'est un exercice consistant par exemple à observer le souffle en nous, à laisser se dire en nous un mantra, etc. Nous rejoignons là les exercices propres aux différents yoga ou à bien d'autres disciplines d'investigation spirituelle.
Voilà pourquoi l'attachement aux biens de ce monde peut-être le début de la sagesse. Voilà aussi pourquoi les plus avides, ceux qui tendent toute leur énergie dans cette quête mal orientée peuvent devenir les plus grands mystiques. L'erreur serait de croire que lâcher prise s'obtient en ne "faisant rien", en attendant que cela se fasse tout seul… Paradoxalement, ne "rien faire" (= la paresse !) est encore un "faire" mal orienté. En revanche "laisser faire", est un "faire" qui peut mener au non-faire. C'est un exercice consistant par exemple à observer le souffle en nous, à laisser se dire en nous un mantra, etc. Nous rejoignons là les exercices propres aux différents yoga ou à bien d'autres disciplines d'investigation spirituelle.
G D
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