Rencontre sur le Mékong

samedi 19 janvier 2013

MIEUX COMPRENDRE LES UPANISHAD (1) - Introduction

Le terme d'Upanishad signifie : "enseignement donné dans l'intimité" ou "enseignement qui détruit l'ignorance"


... cela dit l'importance qu'elles revêtent dans la spiritualité indienne. Bien sots seraient ceux qui estiment ne pas être concernés : ces textes transmettent un enseignement universel et intemporel. Cependant il faut parfois décrypter les images, souvent poétiques - de grands indianistes l'ont fait. 
Nous nous arrêterons à trois d'entre elles, considérées comme majeures (dans les articles 2, 3 et 4). Pour l'instant, abordons quelques points-clés permettant de mieux entrer dans ces textes fondateurs de l'Hindouisme.




Les Upanishad se rattachent à la Shruti (= "révélation", textes d'origine divine transmis à des êtres privilégiés), comme les Veda, les Brâhmana et les Âranyaka. On en compte plus de 200 (certains auteurs disent : plus de 400) dont une vingtaine dites "majeures" : Chandogya, Brihâdaranyaka, Mundaka, Mandukya, Kena, Katha, Isha, Prashna, Aitareya, Taittiriya, etc.
Les Upanishad constituent l'épilogue, la dernière partie du Veda dont elles mettent en lumière  les aspects essentiels. Elles en sont en quelques sorte le couronnement.

Elles ont été composées avant notre ère (les premières datations les situaient aux environs de 600 avant J.C. Actuellement on les repousse aux environs de 1200 voire1500 avant J.C.). Ce qui est certain c'est qu'elles ont été écrites à des époques très différentes. On en trouve même certaines datées des XIX et XXè siècles !
Les indianistes les ont réparties en quatre groupes. Les trois que nous avons retenues appartiennent au 2ème groupe (Isha et Mundaka), la Kena marquant la transition entre le 1er et le 2ème groupe. Elles sont donc toutes trois anciennes.

Le terme d'Upanishad signifie : "enseignement donné dans l'intimité" ou "enseignement qui détruit l'ignorance" (Swâmi Nityabodânanda). Dans tous les cas il s'agit de textes transmis au disciple par le Maître, le Guru, comme se transmet une réalité ultime qui met en situation d'éveil. Cela va donc au-delà d'un "cours", d'un enseignement de type purement intellectuel. C'est pourquoi le lecteur non éclairé, à plus forte raison non "illuminé" ne peut en saisir pleinement la fibre profonde. Nous pouvons certes en faire une lecture "intuitive" en nous laissant porter par les images teintées parfois d'une intense poésie, en nous laissant aller à ce que suggère le texte. Cela n'empêche pas par ailleurs d'en faire une lecture raisonnée et attentive. Elles offrent en effet de quoi réfléchir et de quoi comprendre mieux la civilisation indienne et ses conceptions métaphysiques encore très actuelles.

Nous  découvrons ainsi que c'est dans les Upanishad (dans la Brihadâranyaka par exemple) qu'apparaît la notion de karman (acte entraînant la renaissance des âmes).

Surtout, elles approfondissent la notion de Brahman (déjà posée dans les Brâhmana) et celle d'Âtman, notions centrales sur lesquelles nous nous arrêterons (voir aussi sur notre blog les articles centrés sur ces notions). Disons pour l'instant que la nature et l'identité Brahman-Âtman  constituent le centre irradiant  des Upanishad.

Nous remarquerons que, faute d'un vocabulaire philosophique précis, les Upanishad suggèrent les diverses conceptions par la voie de métaphores, d'images qui permettent d'arriver au sens par l'intuition mais qui posent également des problèmes d'interprétation aux exégètes. Par exemple la Svetâsvatara Upanishad, pour nous faire comprendre l'action du brahman produisant le monde, prend l'image de l'araignée sécrétant sa toile. Or, suivant l'analyse qu'on peut faire de cette image, on peut être conduit au système Sâmkhya (dualiste) comme au Vedanta (moniste). D'autres peuvent être lues comme étant rattachées au Sâmkhya ou au bouddhisme (la Maitri Upanishad, par exemple).

Cela démontre que les Upanishad ne cherchent pas à développer ou à imposer un système de pensée unique comme c'est le cas pour la plupart des dogmes religieux. N'en déduisons pas qu'elles se contredisent. Si les enseignements contenus diffèrent, on y perçoit clairement une continuité,  une inspiration et une aspiration communes. Les points de vue changent, mais non l'essence même de ce qui est considéré.

Autre différence avec la Révélation de type évangélique : ces textes ne sont pas le fruit d'un message délivré pas un Dieu incarné. A l'époque des Upanishad anciennes en tout cas, cette croyance n'est pas née : la croissance individuelle est considérée comme la croissance à laquelle participent plusieurs individus et non un "messie" ou un "prophète". Les Maîtres qui les ont transmises étaient certes des êtres éclairés, des "voyants" mais ne revendiquaient aucun titre : seules comptaient les paroles délivrées. Celles-ci n'étant pas figées dans un espace-temps précis, elle en acquièrent une portée universelle et éternelle. Les auteurs des Upanishad sont restés dans l'ombre : la réalité de leur enseignement n'en brille que davantage. Cela n'empêche pas que nous soient rapportés des dialogues entre le maître et le disciple ; mais l'un et l'autre nous demeurent anonymes. Seul importe le contenu de leur échange.
C'est ce contenu que nous tenterons de décrypter, pour trois Upanishad majeures : l'Isha, la Kena et la Mundaka.  
  
La traduction à laquelle nous nous référerons est celle revue par J. Herbert et contenue dans Trois Upanishad de  Shrî Aurobindo, éditée chez Albin Michel, collection Spritualités vivantes.
Notre but n'est pas de reprendre les commentaires inspirés apportés par Shrî Aurobindo. Pour chaque Upanishad nous dégagerons aussi clairement que possible les idées contenues, puis examinerons la portée qu'elles peuvent exercer dans notre vie. Car ces textes ne sont pas fossilisés mais contiennent une connaissance dont le but est la transformation du lecteur. Ils sont donc encore bien vivants.

                                                                                                                                                        G D


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